épisode d’ Halloween 2020

Les héros marchent difficilement dans la neige qui leur arrive souvent à l’épaule. Tour à tour l’un d’eux ouvre la marche en déblayant avec les bras, mais c’est une tâche harassante et il est vite remplacé. Les chevaux avancent plus aisément grâce à cette méthode. la Dame sent ses pouvoirs s’épuiser et quand c’est son tour de déblayer ne reste pas plus longtemps que ses amis écuyers. Le soir s’installee et la neige qui est tombée abondamment a ralenti considérablement leur progression.

Cette rocaille est difficile pour les héros et les destriers, la montagne au loin qui, pas à pas devient plus imposante, le froid qui se fait plus mordant chaque heure. Le jour se termine, le vent redouble de force et se charge de givre.Pour survivre tout les cinq il faut continuer.


Bertrand : je n’ai jamais vu de neige tomber si abondamment dans cette région et je nous voyais franchir la brèche de Roland après déjeuner et nous mettre à l’abri de l’autre côté pour la nuit. Le soir tombe, la neige recommence à tomber plus intensément, nous aurons de la chance d’atteindre la brèche et un coin pour nous abriter et faire un feu.

Arthur : Si cette masse de neige qui tombe est trop inhabituelle, n’est elle pas surnaturelle, comme lorsque nous étions privé de vent et de pluie sur notre yole en direction de l’Espagne par la créature nuageuse.
La Dame : Je vois mieux dans la nuit que vous, je pense vous guider vers un abri. Ou vers la brèche telle que vous l’avez décrite. Nos poursuivants doivent être plus ralentis que nous sauf peut être celui qui a une odeur de bête fauve.
Philippe : Nous avons encore de quoi faire un feu pour nous réchauffer, sécher nos vêtements et préparer un repas chaud.
Frédérick : Je garde une poignée de mes meilleures flèches avec des pointes d’argent pour cet individu que vous trouvez bizarre. Avant toute cette neige, mes traits ont tempéré leur ardeur.
Arthur : Donnons tout ce qu’on peut avant de nous arrêter. Nos destriers commencent à souffrir du froid et de la hauteur de la neige. Par contre les deux mulets poilus qui transportent nos provisions et l’équipement de montagne s’en sortent mieux.
Bertrand : Arthur, sauf votre respect, cessez de déblayer la neige devant nous, je vois bien que vous souffrez encore de votre épaule. Gardez des forces pour le combat.
Arthur : Vos conseils sont toujours avisés, et vous êtes mon médecin maintenant, en plus de mon précepteur. Je monterai Volpino en dernière position, prêt à fondre sur le premier adversaire qui nous rejoindrait. Il piaffe et s’énerve visiblement, ma présence l’apaisera.
Les héros grimpent encore deux heures entre chien et loup puis dans les ténèbres. Frederick claque des dents ; Arthur gémit faiblement à chaque pas de Volpino ; Philippe s’active à déblayer la voie ; Bertrand grommelle en grec ; Frédérick regarde dans toutes les directions, son arc en main, une flèche encochée ; la Dame renifle et tend l’oreille.
La Dame : il fait si froid que je ne perçois plus d’odeur. Vers le haut je perçois le bruit d’un choc régulier. Si c’est une activité humaine, nous trouverons de l’aide.

Cette leur d’espoir leur redonne du courage. Bertrand distribue un oignon à chacun et un morceau de jambon gelé qu’il tranche avec difficulté malgré la finesse de son couteau. Une heure après tous peuvent entendre un choc sonore et régulier, comme une écuelle de bois.
Arthur tombe deux fois de son destrier, malgré les efforts de celui-ci. Il attache de ses doigts gourds sa ceinture à la lanière qui sert de poignée pour s’accrocher d’une main à la selle. Il ferme les yeux par intermittence, se faisant violence pour rester conscient. Il était brûlant de fièvre, mais il sent qu’il va perdre la bataille contre le froid. Il mâchonne ce qui reste du jambon, principalement la couenne.
Le vent qui descend apporte une odeur de fumée.
La Dame : Je sens une odeur de fumée qui nous est envoyé par le vent des hauteurs.
Philippe s’arrête de déblayer la neige un instant.
Philippe : Je le sens aussi, j’ai cru que c’était mon imagination qui me jouait un mauvais tour. Ce filet d’air qui descend est presque tiède. Il me réchauffe l’âme par avance à défaut de me réchauffer le corps.
Frederick : Je le perçois aussi, nous ne sommes plus très loin d’un abri, j’espère que l’occupant de ce lieu aura l’hospitalité de nous accueillir auprès de son feu.
Bertrand : Sur ma foi, si cet individu a plus de deux sous de charité chrétienne, je saurai le convaincre.
Arthur sans ouvrir les yeux : Je vous en saurai gré, je n’ai plus la force de lutter.
La Dame : Il s’agit de vos vies, et peut être aussi de la mienne, nous saurons bien l’y obliger quitte à le contraindre avant de le remercier.
Ils progressent quelques centaines de toises avant que la Dame ne perçoive une lueur vers le haut à travers les flocons de neige qui tombent dru.
En franchissant un tournant dans le chemin escarpé, chacun leur tour, ils aperçoivent la lueur.
Ils ont un regain de courage pour franchir ce qui reste de distance et endurer le froid vif rendu mordant par le vent dont la force s’accroît au fur et à mesure de l’escalade sur le chemin tortueux.
Malgré la neige en train de tomber, la Dame reconnaît la troué de Roland de Roncevaux telle que Bertrand lui a décrite : une large découpe dans une crête de la montagne. Elle imagine le pouvoir titanesque nécessaire pour ouvrir cette brèche. Mille fois hors de sa portée.
Un peu plus loin sur la gauche une cavité, large mais basse s’ouvre d’où s’échappe la lumière d’un feu vif qui se reflète sur la neige d’une congère bombée dont la forme était idéale pour envoyer la lumière en contrebas pour les guider. La fumée du feu sort par l’ouverture et le vent de Nord la rabat dans leur direction, la plaquant sur le flan de la montagne.
Sur le même côté de la brèche, près de l’ouverture de la grotte, un sabot de bois, suspendu par une ficelle rudimentaire en racine tressée, oscille dans le vent et heurte la paroi battant une mesure lente, régulière et sonore.
Elle ne voit pas âme qui vive, ne perçoit pas de danger imminent, elle aide ses camarades à franchir la dizaine de toises qui les séparent de leur salut.
La Dame : Cette lumière, cette fumée et ce bruit rythmé étaient là pour nous guider.
Frederick : Rentrons nous réchauffer, mais restons sur nos gardes.
Philippe en aidant Arthur à descendre de Volpino : les chevaux ne pourront pas rentrer à cause du plafond bas et de la fumée mais on peut creuser la neige ici et faire de cette congère un rempart contre le vent, ils profiteront un peu de la chaleur du feu, pour la nuit. Doublons leur couvertures.
Frederick en encochant une flèche : Je vais guetter près du feu, installez-vous.
Bertrand regardant son patient bleu de froid à la lumière vive : Arthur, vous êtes très faible, nous allons vous installer un couchage pour vous réchauffer. Ce feu est installé sur une grande pierre plate pour ne pas faire fondre la glace et six grand pierres plates l’entourent, chacune de quoi coucher un homme, installez vous sur celle ci, elle est déjà bien tiède.
Arthur claquant des dents : Merci, je crois qu’il était temps pour moi, j’étais fiévreux à cause de ma blessure, depuis la nuit tombée, avec ce vent, je me suis refroidi, je suis terriblement glacé.
Bertrand : Ce feu va tous nous réchauffer, et un bouillon, ou un potage chaud, nous fera du bien à tous. Cette flambée arrive au bon moment, elle est providentielle même. Et récent, qui a bien pu nous faire ce cadeau ? Lors des nuits les plus froides que j’ai vécues, j’aurai apprécié ces paillasses raides mais chauffées. Arthur, au minimum le bout des vos doigts vont jaunir. D’ici que notre souper soit prêt, mangeons tous quelques biscuits à l’anis.
Philippe se sert de son écu pour dégager la neige en quelques douzaines de gestes vifs puis installe les chevaux.
Philippe : Nos destriers sont à l’abri, je leur ai distribué du fourrage. Je mangerai volontiers vos biscuits.
Frederick : Cette salle est profonde, son sol est constitué de glace, c’est un étang gelé dans la montagne. Il est difficile de s’y déplacer sans perdre l’équilibre.
Bertrand : A défaut de Crampons à nos bottes mettons des chaussettes de laine par dessus nos chaussures pour moins glisser.
La Dame : Je perçois, une odeur étrange, ou un parfum inconnu.
Bertrand a posé leur petit chaudron plein de neige sur le feu. Il s’est assis en posant le haut de la hampe de son épieu sur sa cuisse droite pour l’avoir en main en se levant d’un bond. Avec son couteau il prépare les quelques légumes qu’ils leur restent.
Bertrand : Il va falloir améliorer ce souper, il nous reste peu, Philippe pouvez vous  prélever dans le fourrage des destriers et me rapporter un bol plein d’avoine et un belle carotte, cela complétera ce potage.
Il rajoute deux tranches de lard qu’il détaille en petits morceaux.
Dans les parages du feu, un parfum appétissant ne tarde pas à se mêler à l’odeur de fumée.
Avec les biscuits et la chaleur des flammes chacun va mieux et la couleur de leur visage et de leurs  mains reprend des tons qui sont ceux qu’on voit habituellement chez les vivants.
Arthur, en se réchauffant s’est remis à claquer des dents un court instant quand son corps s’est aperçu qu’il pourrait vaincre le froid.
Philippe dont le visage était empreint de gravité pendant toute la partie nocturne de leur ascension retrouve son sourire.
Frédérick mange d’un bon appétit, se dérouille les épaules, l’arc toujours en main gauche, malgré le bol, deux flèches fichées dans la glace.
Bertrand ressert tout le monde avant de nettoyer le chaudron avec son pain.
La Dame, ne tient pas en place, mange debout en tournant autour du feu, au delà des lueurs vives peintes par les flammes sur la glace translucide.
Bertrand : Dommage que nôtre hôte n’est pas présent, il ne devrait pas être loin, ce feu a été allumé ou entretenu il y a moins d’une heure ou deux. Il y a assez de bois sec pour deux jours mais nous n’avons presque plus de nourriture. Nous avons mangé beaucoup pendant l’ascension pour résister à ce froid peu commun.
La Dame : En plus du feu et de notre souper, je perçois des odeurs étranges, de vieilles odeurs humaines et une odeur inconnue.
Une petite forme sors de l’ombre, là où il n’y avait que la roche et la glace un peu plus tôt et s’exprime en latin : Bienvenue chez moi
C’est une silhouette trapue de moins de trois pieds de haut qui s’avance vers la lumière. Un petit être massif vêtu de plusieurs teintes de brun, de vêtements de cuir et de fourrures rapiécés. Son visage entre dans la lumière, deux yeux brillants d’intelligence et un front bombé tranchent avec les cheveux et la barbe bruns mêlés d’argent. La Dame sort ses dagues et fait face à la créature dont émane l’odeur inconnue
Frederick lâche sa cuillère dans son bol en bois, attrape une flèche, l’encoche et se lève en tendant son arc.
Bertrand se lève en s’appuyant sur l’épieu et fait face au nouvel arrivant.
Philippe se lève et dégaine son épée eu jaugeant son adversaire.
Arthur, ralenti par le froid encore présent dans la moelle de ses os se lève en dernier, la main engourdie sur la poignée de l’épée. Il se sent épaulé par ses amis.
L’intrus toujours en latin : Je ne vous veux pas de mal. Je vous offre l’hospitalité de ma caverne et de mon feu.

Bertrand traduit en breton pour ses amis les phrases de l’inconnu et répond en latin, puis répète en breton.
Bertrand : Nous vous remercions. Nous n’aurions pas trouvé mieux pour nous mettre à l’abri cette nuit. Votre feu est providentiel. Nous allons nous présenter et je vous propose d’en faire de même. Voici Anne, notre Dame qui nous aide dans notre aventure, Arthur de Richemont, fils de de Jean IV, duc de Bretagne et de Jeanne de Navarre, reine des anglais. Philippe de Vierville, pupille de la Bretagne, Frédérick de Malastreg, moi même Beltran de Torre, fils de Bertrand Du Guesclin et de Sonia de Castille
L’inconnu : mon nom est difficile à prononcer ou à entendre pour vous, on m’appelait Forgeron, parfois Épée. Je servi l’Empire de Charlemagne et le bras de Roland de Roncevaux. La majorité du temps j’étais incarné dans l’épée de ce dernier sauf quand je devais l’entretenir. Il m’a libéré en brisant le puissant sort qui nous liait l’épée et moi. La déflagration a été si forte  qu’une brèche a été ouverte dans la montagne. Mon maître a tué beaucoup de ses ennemis, dix milles à lui seul dans sa dernière bataille, tant et tant que la Mort elle même lui accordait certains pouvoirs. Quand il s’est senti perdu, il a voulu briser l’épée contre la montagne, mais c’est la montagne qui fut brisé tant la Mort donnait de la puissance, à lui comme à son épée, prolongement de son bras. Sa volonté de briser l’épée a brisé le sort qui m’enchainait. Je fus projeté au loin, abasourdi. Mon maître fou de colère de n’avoir pas pu briser l’épée la lança au loin vers le royaume de France. Depuis j’attends et je viens  parfois en aide aux voyageurs.
Arthur : Cela fait donc six siècles que vous êtes ici, vous avez vécu dix vies humaines rien qu’ici, quel âge avez vous donc ?
Forgeron : Je ne connais pas trop votre calendrier mais je suis né avant la chute de l’Empire romain. D’abord libre sous la montagne, puis asservi et enchaîné. Depuis plus de 600 hivers, je patiente ici.
Bertrand : Vous avez connu tant de choses, je serai heureux de rester avec vous pour recevoir une partie de votre savoir, mais j’ai la mission de raccompagner ces jeunes gens au royaume de Bretagne. Il nous faut partir vite, dès demain par la route la plus sûre.
Forgeron : Cette salle débouche sur un réseau de tunnels et de salles plus petites par où passe une des sources de la Garonne. C’est très rapide et cela vous met à l’abri du froid et du vent. Malheureusement vos montures ne peuvent pas passer par là.
Philippe : Si nous sommes deux cavaliers pour quatre destriers, un hongre et deux mulets, nous irons vite. Dès le premier village, on pourra échanger les bêtes de somme contre de l’avoine.
Frédérick : Mon arc est peu utile dans des boyaux serrés et là où le plafond est bas mais je peux accompagner Philippe. A deux nous défendrons nos montures.
Arthur : D’accord mais il nous faudra un plan pour chacun, un premier du chemin sous la montagne et un autre de la route à suivre pour se retrouver.
Forgeron : je vous dessinerai ces cartes sur deux peaux de lièvres. Venez voir le début du chemin à suivre.
Il prend un brandon enflammé et part vers le fond de la grotte.
Ils le suivent tous.
Arrivé au bord d’un précipice, il attend qu’ils le rejoignent et  matérialise le bord en le soulignant de son bâton enflammé.
Il lâche le bâton qui descend en tournoyant la surface verticale. La vision de la Dame perce la pénombre. Elle perçoit aussi diverses odeurs humaines. La paroi est très glacée au début puis humide. Un air presque tiède et humide remonte vers eux. Rapidement la source de lumière rebondi avec quelques étincelles avant de s’éteindre dans une flaque.
Forgeron : Forgeron : Voyez, c’est par ici. Il s’agit de descendre environ quarante de vos coudées. Et j’ai vu que vous êtes équipés de longues cordes.
Philippe : Effectivement ce n’est pas un chemin que nos destriers pourraient et ils ne voudraient en aucun cas prendre. Déjà monter et descendre des bateaux ne leur a pas laissé de bons souvenirs.

Arthur : Après cette journée à endurer le froid, ce tunnel me semble accueillant.

Bertrand : Il nous faut dormir maintenant, je vous remercie pour votre aide.
Forgeron : Dormez, je veillerai sur vous et je nourrirai le feu.
Chacun se roule en boule dans sa couverture sur une des pierres plates qui font cercle autour du feu sur la glace. La Dame ferme les yeux mais garde ses autres sens en alerte.
La nuit est calme, les pétillements du feu et des grattements sur de la peau sèche, et quelques fois les sabots cloutés de l’étranger sur la glace.

Au petit matin le feu émet une belle lumière complétée par la lueur blafarde du matin.
Bertrand se lève, part dehors examiner leur situation et remplir son chaudron de poudreuse. A l’entrée de la grotte les destriers ont piétiné la neige, donnant un mélange sale garni de roches brisées haut jusqu’aux boulets, la partie liquide s’évacue partiellement vers la grotte. Plus loin la neige entassée en congères, dépasse le garrot des chevaux et par endroit la hauteur d’un cavalier.
Au retour il prépare un autre potage avec de l’avoine, les derniers légumes et du lard. Il distribuera des biscuits pour compléter.
La Dame sort à son tour, étend chacun de ses sens, ne sent pas de danger. Elle trouve qu’il est temps de manger un petit animal. Elle finit par percevoir le fumet d’un lièvre blanc qui guette à presque vingt pas. Il est invisible quand il est immobile. Elle l’aperçoit quand il tourne les oreilles. Elle saute jusqu’à lui et le poursuit de la main dans son terrier de neige en allongeant un bras sur deux toises. La neige fraîche laisse le bras passer en offrant peu de résistance quand la main suit sa proie dans sa course dans les terriers de neige, qui finit par s’arrêter dans un cul de sac. La Dame le saisit par les oreilles et le ramène près de son visage, défonçant le couvert de neige. elle observe sa proie, perçoit le petit cœur qui bat la chamade, le petit poitrail immaculé qui palpite, elle hume l’odeur de la terreur et plonge son regard dans l’œil affolé et abrège ses souffrances d’un coup de canine, comme elle a vu faire des chats, puis engloutit l’animal.

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