Troisième histoire

C’est ici que débute la troisième partie !

Bertrand : la route à suivre a l’air d’être une ancienne voie romaine, nous pourrons l’emprunter à un bon rythme. Nous avons deux grosses journées de voyages jusqu’à Saint jacques de Compostelle.
Philippe : Si nous raccourcissons notre nuit et fractionnons le trajet et la fatigue, nous pouvons y être demain à midi. Donnons notre maximum et celui de nos destriers pour échapper à nos poursuivants.
Arthur : Arrivés à destination, il nous faudra utiliser la ruse, sans doute des déguisements comme vous ma Dame ce matin.
Bertrand : Il faudra réfléchir à votre identité, et donc vous trouver un prénom. Nous ne sommes pas de trop de quatre pour assurer l’escorte d’une demoiselle de la noblesse, si vous voulez tenir ce rôle.
La Dame : Je veux bien essayer avec l’aide de vous tous. Bertrand, vous m’avez proposer de me baptiser sur l’île du grimoire, Je suis d’accord pour que vous choisissiez à vous quatre un prénom qui me convienne et que vous Bertrand me baptisiez quand vous le trouverez utile.
Philippe : Il faudra vous trouver une monture et un harnachement de circonstance. Une jument, un hongre peut être avec une belle prestance mais docile et qui supporte votre présence près de lui et sur son dos sans peur ni méfiance.
Arthur : Si comme nous trois, vous ne connaissez pas l’espagnol, il faudra que vous soyez native d’ailleurs et nous trois votre escorte et Bertrand, notre guide et interprète.
Frédérick : Pourquoi pas imaginer que nous amenons notre Dame en épousailles d’un noble choisi en visant notre destination.
Bertrand : Très bonne idée. Il y a trop de monde après nous dans l’Ouest, prenons plein Est et cherchons de l’aide en Navarre, royaume qui a vu naitre votre mère, Arthur, ou en Castille qui a vu naitre la mienne. Nous y trouverons l’aide dont nous aurons besoin.
Arthur : Dans Saint-Jacques nous achèterons tout ce dont nous avons besoin pour le chemin vers notre destination fictive et modifier notre apparence, mais avant d’y rentrer, Il nous faudra déjà avoir choisi pour chacun une autre identité et pour ma Dame, un époux plausible.
Bertrand : Nous allons réfléchir en route au meilleur candidat pour cette fiction. D’ici là allons prestement. Courez devant, ma Dame aussi vite que vous le pouvez, nous suivrons.

ils parcourent une route vide pendant toute la matinée. A la mi journée, après le croisement de deux routes, ils trouvent un homme âgé assis en tailleur, maigre, le teint hâlé, le visage fripé façonné par son sourire. Il joue une mélodie enjouée sur une petite flûte de bois noir.

Bertrand s’adresse à lui en espagnol : Saint homme, nous sommes des hommes de bien et notre mission est périlleuse. Nous sommes poursuivis.
L’inconnu répond en espagnol en désignant le côté opposé de la route : Si quelqu’un demande, je répondrai par la vérité depuis que je suis assis ici je n’ai vu passer personne.
Bertrand : Merci et que l’amour t’accompagne.

Frédérick et Philippe ferment la marche en effaçant les traces. Le groupe s’éloigne. L’inconnu se lève, empoigne ses maigres bagages, balaie la surface qu’il occupait d’un grand mouvement de sandale et va s’asseoir en face.

Plus tard quand ils se sont éloignés.

Philippe : Quel homme étrange. Sa façon de dire la vérité est amusante.

Bertrand : C’est un soufi, un ascète de la religion de Mahomet. Ce sont des hommes de bien. J’ai confiance dans sa parole et sa bienveillance.

Arthur : Espérons que nos poursuivants ne devinent pas qu’il nous protège.
La Dame : Espérons qu’il ne croise pas nos poursuivants ou que la violence ne soit pas utilisée contre lui.
Bertrand : Je lui souhaite aussi. Ces ascètes sont réputés pour leur résistance mentale et physique. Souhaitons lui de ne pas avoir d’ennui à cause de nous.

Plus tard sur la route.

La Dame : J’aperçois au loin une longue colonne de piétons et de mulets.

Bertrand : Je pense que ce sont des pèlerins ou de marchands ou un mélange des deux. Reposons nous maintenant pour prendre des forces plutôt que de les rencontrer d’ici peu. Quand il fera nuit, ils auront quitté la route pour bivouaquer et nous les croiseront sans qu’ils puissent nous apercevoir et renseigner nos poursuivants.

Philippe : Nos destriers ont encore de l’entrain, grâce à toute cette bonne herbe qu’ils ont ingurgité pendant des semaines.

Arthur : Restaurons nous, reposons nous puis franchissons une demi douzaine de lieues avant de dormir.

Bertrand : Profitons de cette halte pour prendre soin de cette blessure, Arthur. J’ai hâte de m’arrêter dans une vraie ville pour trouver des remèdes assez forts pour assainir définitivement cette plaie.

La plaie n’est pas belle, et la Dame garde pour elle qu’elle dégage encore une odeur fétide.

Ils repartent après avoir mangé la moitié de leur provisions.

Frédérick, à l’affût assez loin du lieu de leur halte abat un couple de volatiles à la robe claire qui se blottissait dans un buisson. Il les ouvre et les nettoie dans le ruisseau en aval des chevaux et rejoint ses amis.

Frédérick : Voici de quoi souper cette nuit, on essaiera de faire le feu le plus discret possible. Les plus grandes plumes me permettrons de réparer certaines flèches et d’en fabriquer de nouvelles.

Bertrand : Cette provende est une bonne chose pour compenser notre harassement malgré notre manque de provision. Nous allons espérer que ces proies, des faisans dorés, sont « res nullius », qu’elles n’appartiennent à personne. En attendant le souper, elles seront mieux à l’abri des regards dans tes fontes si nous rencontrons des soldats ou des hommes liges du seigneur local.

Arthur : Nous n’avons que nos possessions pour nous définir comme nobles et nous n’avons pas le temps d’entrer en conflit.

Bertrand : il me reste autre chose mais je préfère m’en servir le plus tard possible et dans un territoire ou il sera plus efficace.

Philippe : Les destriers sont abreuvés et nourris, bouchonnés et un peu reposés, repartons vite.

Après avoir avalé quelques lieues le soir s’installe, puis la nuit. La lune et les étoiles apportent assez de clarté pour avancer au trot.

Puis sur leur route, d’abord la Dame qui court devant, puis les autres, devinent, à l’écart, le bivouac du convoi qui les précédait. Ils passent au pas près du camp pour ne pas donner l’alarme.

Vers minuit, ils s’arrêtent à nouveau et cherchent un endroit abrité du vent pour dormir.

Bertrand : Pour cette courte nuit, il nous faut un peu de confort, un feu sera utile pour nous réchauffer et cuire les faisans giboyés par Frédérick. Nous sommes trempés par les averses nocturnes qui ont tombé dru.

Arthur : Je grelotte, je ne vais pas tarder à claquer des dents, je suis d’accord pour ce feu.

Bertrand : Ta blessure t’épuise et m’inquiète. A Saint Jacques de Compostelle nous trouverons de quoi te soigner. A partir de cette ville, la route est jalonnée d’établissements des Hospitaliers qui ont vocation de prendre soin des pèlerins. J’espère que nous arriverons à échapper suffisamment à nos poursuivants pour nous y arrêter.

Philippe panse les chevaux. Frédérick prépare un feu dans un creux derrière un haut talus qui abrite du vent. Il a trouvé sur les arbres, des branches mortes, du bois sec dont il espère peu de fumée. Bertrand prend soin d’Arthur qui est pâle. La Dame, tous sens en éveil, guette. Elle ne ressent pas le besoin de manger, la vitalité offerte par le poulpe est encore très présente, malgré cette longue journée et cette aube très intense.

Encore au brouillon

Le passage chez les hospitaliers leur a fait du bien pour guérir  les plaies et les bosses. L'étuve a assoupli leur muscles, effacé les  raideurs et éliminé la crasse. La Dame est peu tolérée dans ces endroits  où les corps vont dénudés, elle est partie chasser pour faire des   provisions.
Arthur est encore un peu faible et se réchauffe toujours  moins vite que les autres. Les bains chauds lui ont rendu les couleurs  qu'il avait perdues sur le navire des pirates. Il en a profité plus  longtemps et ses amis sont heureux de le savoir bien vivant.
Le  groupe continue son chemin en quittant Pampelune. Il a neigé dans la  nuit et Philippe s'inquiète pour les traces faciles à suivre qu'ils vont  laisser à leurs poursuivants. Leur équipage est constitué des quatre  destriers, d'un hongre pour la dame et de deux poneys robustes.
Au  détour d'un chemin encaissé dans la rocaille où  une congère  s'est  amoncelée, le tir d'un trait arbalète brise le silence feutré par la  neige. C'est Bertrand qui était visé et le projectile lui fait vider les  étriers  et l'envoie une dizaine de pas en arrière s'enfoncer et  disparaître dans la neige épaisse.
Des voix vociférant en espagnol se  font entendre pendant que des pas font craquer la neige . Les trois  chevaliers sortent au galop de la zone en goulet et s'alignent de front  face à une petite dizaine d'hommes équipés de matériels assortis.
La Dame quitte son hongre qui refuse de bouger et bondit en avant.
Des cliquetis se font entendre derrière un pavois usé.
Un  des hommes avec une attitude hautaine s'adresse aux trois chevaliers,  toujours en espagnol. Arthur ne comprend que quelques mots, souvenirs  d'enfance, mais l'accent et le dialecte différent ne lui permettent pas  de comprendre plus que la menace et l'idée de vol. Il tente une réponse  simple.
"Fuyez ou vous mourrez" .
Frédéric tire dans le coin supérieur droit du pavois qui pivote révélant un gars pressé de remonter son cranequin.
Philippe évalue la distance et à défaut de lance de cavalerie réclame à la Dame l'épieu de Bertrand.
Frédérick encoche trois flèches et penche son arc de trois quarts, crie trois morts en espagnol.
La  Dame bondit jusqu'à Volpino pour l'épieu puis jusqu'à Philippe pour lui  tendre.Le cliquetis du cranequin s'accélère pendant que le tireur  hahanne sous l'effort.
Arthur dégage son bouclier normand et sort son épée
Frédérick  plisse les yeux, se concentre sur la respiration de Quijote, tire quand  elle est la plus ample. Les flèches presque au même niveau.
Philippe part au galop la hampe de l'épieu verticale
La Dame saute en avant, atterri sur les bras dans la neige puis double son saut d'une poussée des jambes
Volpino,  sans Bertrand, charge l'homme le plus à droite et d'une poussée des  postérieurs lui imprime ses sabots antérieurs dans le buste avec un  craquement organique désagréable. Ce qui reste de l'homme est projeté à  plusieurs pas et va rougir la neige fraîche.
La première flèche  atteint sa cible à l'épaule gauche et la traverse de part en part. La  deuxième touche l'autre bandit à la base du cou et ressort de la  longueur d'un demi pied dans le dos. La dernière flèche frôle la  troisième cible en emportant une oreille entière au passage.
Philippe  charge droit devant et touche au moment où son adversaire tourne pour  s'enfuir. Il embroche le bras gauche et le torse puis le bras droit et  perd son épieu sous le choc
Arthur charge, pare le coup qui lui est adressé, fait sauter l'épée et blesse l'adversaire au bras d'armes.
La Dame, ralentie par la neige arrive à une quinzaine de pas du tireur qui mouline fort, sa peur devient tangible pour elle. 
dans  l'air froid. Anne saute en avant et projette sa langue vers  l’arbalétrier. L'extrémité large et gluante percute le mécanisme en  action, s'enroule autour à cause de l'élan imprimé par l'homme. Cette  chair souple et sensible est déchirée par les engrenages.Le sang gicle  autant sur l'homme que dans le mécanisme. Le tireur brûlé au cou, au  visage et aux mains, hurle, jette son arme loin de lui avant de  s'enfoncer la tête dans la neige molle et frotter ses brûlures.
Arthur crie à nouveau en espagnol « Rendez vous ou mourez »
La  Dame pousse un cri inarticulé et se rapproche délicatement de  l'extrémité de sa langue à dix pas d'elle. Loin à l'arrière, elle entend  du mouvement et quelques toux et des respirations difficiles  dans la  neige au niveau de la congère.
Arthur se tourne fugitivement vers l'arrière et crie "Bertrand a besoin de notre aide".
Frédérick encoche trois flèches à nouveau, puis fait volte-face pour rejoindre Bertrand. 
Philippe  se penche agrippé à l’encolure de Qredo pour ramasser l'épieu et menace  du regard les trois hommes valides et les blessés debout, du regard et de l'arme.
Frédérick approche de la congère défoncée par la forme du corps de Bertrand. Il saute à terre,  appelle Bertrand, s'avance vers le bruit et quand la neige lui  arrive à l'aisselle, il cherche dans la neige et agrippe une main et tire de toutes  ses forces. Bertrand a la face rouge presque violacée, les lèvres  bleues. Il s'assoit dans la neige tousse avec force, le bruit de  l'écho  de l'espace encaissé lui répond, tousse encore et respire à plein  poumons jusqu'à reprendre la couleur des vivants.
Quand enfin il peut parler d'une petite voix, loin de sa voix tonitruante habituelle.
Bertrand : Merci Frédérick pour ton aide. Quel choc, quel vol.
Il  se lève avec l'aide de Frédérick et aperçoit le vireton qui dépasse à  moitié de sa besace. Frédérick reconnait ce projectile et voit du sang  couler sur les vraies de son ami.
Frédérick : Vous saignez.
Bertrand : Ce carreau du diable m'a entamé mais il aurait pu me transpercer
Il déboucle la lanière de sa besace et tire doucement vers l’extérieur et relève sa robe de bure. Un trou trois pouces au dessus du nombril.
Il l'écarte en tirant la peau du ventre de part et d'autres
Bertrand : Frédérick dit moi quelle profondeur a cette plaie.
Frédérick : environ deux pouces, peut être plus, un caillot de sang commence à se former. Vous avez la peau dure.
Bertrand  : C'est l'amour de la littérature qui m'a sauvé. Le cuir de la besace  est plus solide que ma peau, et ce projectile en a traversé quatre  épaisseurs ainsi que ma bible et l'exemplaire de l'Odyssée que j'ai copiés moi même. J'ai beaucoup de lard sur le ventre. Et j'ai de la  chance. Dis m'en plus sur nos agresseurs ?
Il se nettoie les mains dans la neige deux fois avant de ramasser une belle poignée pour assainir la plaie.
Frédérick : une dizaine de bandits dont quelques uns sont encore valides.
Bertrand : Attrapons nos poneys avant de rejoindre nos camarades.

Frédérick remonte sur son destriers et va chercher le hongre de la Dame auquel sont accrochés les poneys en file.
Bertrand  avance avec difficulté au début puis un peu plus facilement. Il rejoint  Volpino, attrape les rennes et constate l'état de son adversaire et des  autres bandits.

La Dame a  rejoint le tireur, tient la grosse arbalète dans les bras, la langue  toujours prise dans le mécanisme. Elle en a rentré dans sa bouche le plus possible pour  éviter les gelures et tient le mécanisme sous le menton.

Elle retourne doucement vers ses amis en émettant quelques mots constitués surtout de voyelles.

Bertrand  : Merci Anne d'avoir neutraliser ce tireur. Ce projectile aurait pu  tuer chacun d'entre nous, voire même en transpercer deux même avec nos  armures. C'est pourquoi il a longtemps été interdit par l'église contre  les chrétiens. Je vois qu'à vous quatre vous êtes comme Thésée  débarrassant la Grèce des bandits sur sa route. Approchez ma Dame, nous allons vous libérer de cette machine de guerre. Philippe, trouvez comment libérer ces engrenages.
La Dame approche entre eux.
Frédérick maintient en joue ses adversaires passant sa visée de l'un à l'autre.
Arthur : libérez ce cliquet relâchera la pression sur vos chairs.
Le tireur ne gémit plus.
Bertrand  en breton puis en espagnol : Bandits avec cette attaque vous faites un  double crime contre Dieu, contre l'église et contre nous. Votre embûche  n'est pas chrétienne, vous tirez avec une arme interdite par l'église  sur un homme portant les robes monastiques et vous rançonnez d'autres  hommes d'église. Je vais vous excommunier sur le champs, puis nous  achèveront vos blessés trop difficiles à soigner. Je pense que si vous  m'aviez tué, mes amis, mes frères n'auraient eu aucune pitié et vous  auraient massacré jusqu'au dernier.







Les héros marchent difficilement dans la neige qui leur arrive souvent à l'épaule. Tour à tour l'un d'eux ouvre la marche en déblayage avec les bras, mais c'est une tâche harassante et il est vite remplacé. Les chevaux avancent plus aisément grâce à cette méthode. la Dame sent ses pouvoirs s'épuiser et quand c'est son tour de déblayer ne reste pas plus longtemps que ses amis chevaliers. Le soir tombe et la neige qui est tombée abondamment a ralenti considérablement leur progression.
Bertrand : je n'ai jamais vu de neige tomber si a abondamment dans cette région et je nous voyais franchir la brèche de Roland après déjeuner et nous mettre à l'abri de l'autre côté pour la nuit. Le soir tombe, la neige recommence à tomber plus intensément, nous aurons de la chance d'atteindre la brèche et un coin pour nous abriter et faire un feu.
La Dame : je vois mieux dans la nuit que vous je pense vous guider vers un abri. Ou vers la brèche telle que vous l'avez décrite. Nos poursuivants doivent être plus ralentis que nous sauf peut être celui qui a une odeur de bête fauve.
Philippe : nous avons encore de quoi faire un feu pour nous réchauffer, sécher nos vêtements et préparer un repas chaud.
Frédérik : je garde une poignée de mes meilleures flèches pour cet individu que vous trouvez bizarre ou tous nos poursuivants. Avant toute cette neige, mes flèches ont tempéré leur ardeur.
Arthur : donnons tout ce qu'on peut avant de nous arrêter. Nos destriers commencent à souffrir du froid et de la hauteur de la neige. Par contre les deux mulets poilus qui transportent nos provisions et l'équipement de montagne s'en sortent mieux.
Bertrand : Arthur, sauf votre respect, cessez de déblayer la neige devant nous, je vois bien que vous souffrez encore de votre épaule. Gardez des forces pour le  combat.
Arthur : Vos conseils sont toujours avisés, et vous êtes mon médecin maintenant, en plus de mon précepteur. Je monterai Volpino en dernier, prêt à fondre sur le premier adversaire qui nous rejoindrait. Il piaffe et s'énerve visiblement, ma présence l'apaisera.
Les héros grimpent encore deux heures entre chien et loup puis dans les ténèbres. Frederick claque des dents, Arthur gémit faiblement à chaque pas de Volpino, Philippe s'active à déblayer la voie, Bertrand grommelle en grec, la Dame renifle et tend l'oreille.
La Dame : il fait du froid que je ne perçois plus d'odeur. Vers le haut je perçois le bruit d'un choc régulier. Si c'est une activité humaine, nous trouverons de 'aide. Cette leur d'espoir leur redonne du courage. Bertrand distribue un oignon à chacun et un morceau de jambon qu'il tranche avec difficulté malgré la finesse de son couteau. Une heure après tous peuvent entendre un choc sonore et régulier, comme une écuelle de bois. Le vent qui descend leur apporte une odeur de fumée.
Arthur tombe deux fois de son destrier, malgré les efforts de celui-ci. Il attache de ses doigts gourds sa ceinture à la lanière qui sert de poignée pour s'accrocher d'une main à la selle. Il ferme les yeux par intermittence, se faisant violence pour rester conscient. Il était brûlant de fièvre, mais il sent qu'il va perdre la bataille contre le froid. Il mâchonne ce qui reste du jambon, principalement la couenne.
La fumée perceptible d'abord par la Dame, puis par les autres.
La Dame : je se sens une odeur de fumée qui nous est envoyé par le vent des hauteurs.
Philippe s'arrête de déblayer la neige un instant. 
Philippe : je le sens aussi, j'ai cru que c'était mon imagination qui me jouait un mauvais tour. Ce filet d'air qui descend est presque tiède. Il me réchauffe l’âme par avance à défaut de me réchauffer le corps.
Frederick : je le sens aussi, nous ne sommes plus très loin d'un abri, j'espère que l'occupant de ce lieu aura l'hospitalité de nous accueillir auprès de son feu.
Bertrand : Sur ma foi, si cet individu a plus de deux sous de charité chrétienne, je saurai le convaincre.
Arthur sans ouvrir les yeux : Je vous en saurai gré, je n'ai plus la force de lutter.
La Dame : Il s'agit de vos vies, et peut être aussi de la mienne, nous saurons bien l'y obliger quitte à le contraindre avant de le remercier.
Ils progressent quelques centaines de toises avant que la Dame ne perçoive une lueur vers le haut à travers les flocons de neige qui tombent dru.
En franchissant un tournant dans le chemin escarpé, chacun leur tour, ils aperçoivent la lueur.
Ils ont un regain de courage pour franchir ce qui reste de distance et endurer le froid vif rendu mordant par le vent dont la force s'accroît au fur et à mesure de l'escalade sur le chemin tortueux.
Malgré la neige en train de tomber, la Dame reconnaît la troué de Roland de Roncevaux telle que Bertrand lui a décrite : une large découpe dans une crête de la montagne. Elle imagine le pouvoir titanesque nécessaire pour ouvrir cette brèche. Mille fois hors de sa portée.
Un peu plus loin sur la gauche une cavité  large mais basse s'ouvre d'où s'échappe la lumière d'un feu vif qui se reflète sur la neige d'une congère bombée dont la forme était idéale pour envoyer la lumière en contrebas pour les guider. La fumée du feu sort par l'ouverture et le vent de Nord la rabat dans leur direction, la plaquant sur le fond de la montagne.
Sur le même côté de la brèche, près de l'ouverture de la grotte, un sabot de bois, suspendu par une ficelle rudimentaire en racine tressée, oscille dans le vent et heurte la paroi battant une mesure lente, régulière et sonore.
Elle ne voit pas âme qui vive, ne perçoit pas de danger imminent, elle aide ses camarades à franchir la dizaine de toises qui les séparent de leur salut.
La Dame : cette lumière, cette fumée et ce bruit rythmé étaient là pour nous guider.
Frederick : rentrons nous réchauffer, mais restons sur nos gardes.
Philippe en aidant Arthur à descendre de Volpino : les chevaux ne pourront pas rentrer à cause du plafond bas et de la fumée mais on peut creuser la neige ici et faire de cette congère un rempart contre le vent, ils profiteront un peu de la chaleur du feu, pour la nuit.
Frederick en cochant une flèche : je vais guetter près du feu, installez-vous.
Bertrand regardant son patient bleu de froid à la lumière vive : Arthur, vous êtes très faible, nous allons vous installer un couchage pour vous réchauffer.
Arthur claquant des dents : Merci, je crois qu'il était temps pour moi, j'étais fiévreux à cause de ma blessure, depuis la nuit tombée, avec ce vent je me suis refroidi, je suis terriblement glacé.
Bertrand : Ce feu va tous nous réchauffer, et un bouillon, ou un potage chaud, nous fera du bien à tous.
Il arrive au bon moment, il est providentiel même il est récent, qui a bien pu nous faire ce cadeau ?
Bertrand : Arthur, au minimum le bout des vos doigts vont jaunir. D'ici que notre souper soit prêt, mangeons tous quelques biscuits à l'anis.
Philippe : Nos destriers sont à l'abri, je leur ai distribué du fourrage. Je mangerai volontiers vos biscuits.
Frederick : Cette salle est profonde, son sol est constitué de glace, c'est un étang gelé dans la montagne. Il est difficile de s'y déplacer sans perdre l'équilibre.
Bertrand : A défaut de Crampons à nos bottes mettons des chaussettes de laine par dessus nos chaussures pour moins glisser.
La Dame : je perçois, une odeur étrange, ou un parfum inconnu.
Bertrand a posé leur petit chaudron plein de neige sur le feu. Il s'est assis en posant le haut de la hampe de son epieu sur sa cuisse droite pour l'avoir en main en se levant d'un bond. Avec son couteau il prépare les quelques légumes qu'ils leur restent.
Bertrand : il va falloir améliorer ce souper, il nous reste peu, Philippe pouvez vous  prélever dans le fourrage des destriers et  me rapporter un bol plein d'avoine et un belle carotte, cela complétera ce potage.
Il rajoute deux tranches de lard qu'il détaille en petits morceaux.
Dans les parages du feu, un parfum appétissant ne tarde pas à se mêler à l'odeur de fumée.
Avec les biscuits et la chaleur des flammes chacun va mieux et la couleur de leur visage et de leurs  mains reprend des tons qui sont ceux qu'on voit habituellement chez les vivants.
Arthur, en se réchauffant s'est remis à claquer des dents un court instant quand son corps s'est aperçu qu'il pourrait vaincre le froid.
Philippe dont le visage était empreint de gravité pendant toute la partie nocturne de leur ascension retrouve son sourire.
Frédérick mange d'un bon appétit, se dérouille les épaules, l'arc toujours en main, deux flèches fichés dans la glace.
Bertrand ressert tout le monde avant de nettoyer le chaudron avec son pain.
La Dame, ne tient pas en place, mange debout en tournant autour du feu, au delà des lueurs vives peintes par les flammes sur la glace translucide.
Bertrand : Dommage que nôtre hôte n'est pas présent, il ne devrait pas être loin, ce feu a été allumé ou entretenu il y a moins d'une heure ou deux. Il y a assez de bois sec pour deux jours mais nous n'avons presque plus de nourriture. Nous avons mangé beaucoup pendant  l'ascension pour résister à ce froid peu commun.
La Dame : en plus du feu et de notre souper, je perçois des odeurs étranges, de vieilles odeurs humaines et une odeur inconnue.
Une petite forme sors de l'ombre, là où il n'y avait que la roche et la glace un peu plus tôt.
En latin
Bien venu chez moi
C'est une silhouette trapue de moins de trois pieds de haut qui s'avance vers la lumière. Un petit être massif vêtu de plusieurs teintes de brun, de vêtements de cuir rapiécés. Son visage entre dans la lumière, deux yeux brillants d'intelligence et un front bombé tranchent avec les cheveux et la barbe bruns mêlés d'argent. La Dame sort ses dagues et fait face à la créature dont émane l'odeur inconnue 
Frederick lâche sa cuillère dans son bol en bois, attrape une flèche, l'encoche et se lève en tendant son arc.
Bertrand se lève en s'appuyant sur l’épieu et fait face au nouvel arrivant.
Philippe se lève et dégaine son épée eu jaugeant son adversaire.
Arthur, ralenti par le froid encore présent dans la moelle de ses os se lève en dernier. Il se sent épaulé par ses amis.
L'intrus en latin : Je ne vous veux pas de mal. Je vous offre l'hospitalité de ma caverne et de mon feu.
Bertrand : nous vous remercions. Nous n'aurions pas trouvé mieux pour nous mettre à l'abri cette nuit. Votre feu est providentiel. Nous allons nous présenter et je vous propose d'en faire de même. Voici notre Dame qui nous aide dans notre aventure, Arthur de Richemont, fils de et de Jeanne de Castille, reine des anglais. Philippe . .., Frédérick, moi même Beltran de Torre, fils de Bertrand Du Guesclin et de Sonia....
L'inconnu : mon nom est difficile à prononcer ou à entendre pour vous, on l'appelait Forgeron, parfois Épée. Je servi l'Empire de Charlemagne et le bras de Roland de Roncevaux. La majorité du temps j'étais incarné dans "" l'épée de ce dernier sauf quand je devais l'entretenir. Il m'a libéré en brisant le puissant sort qui nous liait l'épée et moi. La déflagration a été si forte  qu'une brèche a été ouverte dans la montagne. Mon maître a tué beaucoup d'ennemis, 10 000 à lui seul dans sa dernière bataille, tant et tant que la Mort elle même lui accordait certains pouvoirs. Quand il s'est senti perdu, il a voulu briser l'épée contre la montagne, mais c'est la montagne qui fut brisé tant la Mort donnait d'où pouvoir, à lui comme à son épée, prolongement de son bras. Sa volonté de briser l'épée a brisé le sort qui m'enchainait. Je fus projeté au loin, a abasourdi. Mon maître fou de colère de n'avoir pas pu briser l'épée la lança au loin vers le royaume de France. Depuis j'attends et je viens  parfois en aide aux voyageurs.
Arthur : Cela fait donc six siècles que vous êtes ici, vous avez vécu dix vies humaines rien qu'ici, quel âge avez vous donc ?
Forgeron : Je ne connais pas trop votre calendrier mais je suis né avant la chute de l'Empire romain. D'abord libre sous la montagne, puis asservi et enchaîné. Depuis plus de 600 hivers, je patiente ici.
Bertrand : Vous avez connu tant de choses, je serai heureux de rester avec vous pour recevoir une partie de votre savoir, mais j'ai la mission de raccompagner ces jeunes gens au royaume de Bretagne. Il nous faut partir vite dès demain par la route la plus sûre.
Forgeron : Cette salle débouche sur un réseau de tunnels et de salles plus petites par où passe une des sources de la Garonne. C'est très rapide et cela vous met à l'abri du froid et du vent. Malheureusement vos montures ne peuvent pas passer par là.
Philippe : Si nous sommes deux cavaliers pour quatre destriers et deux mulets, nous irons vite. Dès le premier village, on pourra échanger les bêtes de somme contre de l'avoine.
Frédérick : Mon arc est peu utile dans des boyaux serrés et là où le plafond est bas mais je peux accompagner Philippe.
Arthur : D'accord mais il nous faudra un plan pour chacun, un premier du chemin sous la montagne et un autre de la route à suivre pour se retrouver.
Forgeron : je vous dessinerai ces cartes sur deux peaux de lièvres. Venez voir le début du chemin à suivre.
Il prend un brandon enflammé et part vers le fond de la grotte.
Ils le suivent tous.
Arrivé au bord d'un précipice, il attend qu'ils le rejoignent et  matérialise le bord en le soulignant de son bâton enflammé.
Il lâche le bâton qui descend en tournoyant la surface verticale. La vision de la Dame perce la pénombre La paroi est très glacée au début puis humide. Un air presque tiède et humide remonte vers eux. Rapidement la source de lumière rebondi avec quelques étincelles avant de s'éteindre dans une flaque.
Forgeron : Il s'agit de descendre environ 30 de vos coudées. Et j'ai vu que vous êtes équipé de longues cordes.
Philippe : Effectivement ce n'est pas un chemin que nos destriers pourraient  et ils ne voudraient en aucun cas prendre. Déjà monter et descendre des bateaux ne doit pas leur laisser de bons souvenirs.

Bertrand : il nous faut dormir maintenant, je vous remercie pour votre aide.
Forgeron : Dormez, je veillerai sur vous et je nourrirais le feu.
Chacun se roule en boule  dans sa couverture sur une des pierres plates qui font cercle autour du feu sur la glace. La Dame ferme les yeux mais garde ses autres sens en alerte. 
La nuit est calme, les pétillements du feu et des grattements sur de la peau sèche, et quelques fois les sabots cloutés de l'étranger sur la glace.
Forgeron : Voyez, c'est ici qu'il faut descendre
Au petit matin le feu émet une belle lumière complétée par la lueur blafarde du matin.
Bertrand se lève, part dehors examiner leur situation et remplir son chaudron de neige. A l'entrée de la grotte les destriers ont piétiné la neige, donnant un mélange sale haut jusqu'aux boulets, la partie liquide s’évacue partiellement vers la grotte. Plus loin la neige entassée en congères, dépasse le garrot des chevaux et par endroit la hauteur d'un cavalier.
Au retour il prépare un autre potage avec de l'avoine, les derniers légumes et du lard. Il distribuera des biscuits pour compléter.
La Dame sort à son tour ,étend chacun de ses sens, ne sent pas de danger. Elle trouve qu'il est temps de manger un petit animal. Elle finit par percevoir le fumet d'un lièvre blanc qui guette à presque vingt pas. Il est immobile sauf quand il tourne les oreilles. Elle saute jusqu'à lui et le poursuit de la main dans son terrier de neige en allongeant un bras sur deux toises. La neige fraîche laisse le bras passer en offrant peu de résistance quand la main suit sa proie qui finit par s'arrêter dans un cul de sac. La Dame la saisit par les oreilles et le ramène près de son visage, défonçant le couvert de neige. elle observe, perçoit le petit cœur qui bat la chamade, le petit poitrail immaculé qui palpite.