première histoire page 3

L’auberge est bien fréquentée, la clientèle composée de marchands, d’artisans et de pèlerins de toutes obédiences, l’accueil chaleureux. La chambre offerte par Arthur était petite mais coquette, les repas bien cuisinés et copieux mais il reste toujours un creux à l’estomac.

Avant l’aube du troisième jour, réveillée par la faim, de ruelle en venelle, surprenant de gros rats apeurés, poursuivant un vieux chat maigre. Elle arrive sur la place du marché, où s’étale des vendeurs de volailles et de bétail, dont un petit enclos de cochons de lait criards.

Avisant l’un d’eux, bien rose et dodu, elle approche, fait face au mur contigu, créant un espace d’intimité, sourit de toutes ses belles dents. Elle élargit son sourire à plus d’un pied, passa sa langue sur ses dents luisantes de salive et à l’insu de tous, allongea le bras vers lui. Elle appliqua fermement sa main sur le groin du porcelet, l’apporte vivement près d’elle, l’empoigne des deux mains et le porte à ses lèvres.

Elle ouvre grand la bouche, engloutit l’animal qui faisait au moins vingt cinq livres de chair et d’os, gonflant ses joues puis déglutit. cette masse supplémentaire, distend sa gorge, son cou, puis sa robe et se stabilise au niveau du nombril tirant la peau et la soie verte.

L’apparition soudaine de cette protubérance attire l’attention des marchands et des camelots qui avaient observé le passage de la « dame ». Le propriétaire du cochon constate son absence puis pousse un cri, voyant la proéminence qui a remplacée la taille fine vue à l’instant. Il vocifère « la voleuse, la voleuse »

Elle s’enfuit dans une ruelle en descente, ceinturant son ventre de ses mains, une odeur d’embruns se mêle aux odeurs organiques de la ville. Une petite escouade de miliciens en armes et armures usagées rejoint le marché et interroge le marchand lésé. Ce groupe part à sa poursuite.

Les cris des mouettes, les odeurs de marée lui arrivèrent lors de sa descente puis elle déboucha sur une placette à demi bordée d’un port. La plupart des navires étaient marchands, quelques bateaux de pêche s’apprêtent à partir et un puissant bâtiment de guerre arrive à quai.

Arrêtant sa course au milieu de la place, par manque de poursuivant et de choix de direction, elle vit un colosse en armure complète sauter du plus gros bateau sur le quai d’un bond d’au moins trois mètres, prenant pied avant les marins, puis les miliciens et le marchand déboulèrent suants sur la placette.

Le commerçant s’adressant au colosse puis montrant le ventre, Messire Paladin cette femme m’a volé un cochon et l’a avalé , voyez il est ici

il répond « C’est pour occire cette créature démoniaque que j’ai débarqué promptement », sort sa grande épée à deux mains rangée dans son dos. Il abaisse la visière de son casque et frappe deux fois, elle esquive, se faisant légèrement entailler au bras droit à la deuxième attaque.

Le sang sur l’épée émet des fumerolles. Instinctivement, elle sort ses dagues et se met en position pour parer. Le paladin frappe encore. Elle pare, riposte. Il redouble ses attaques, elle pare, riposte touchant de peu le pectoral d’acier bleui. En dégageant son épée, il la blesse aux avant bras.

L’épée fume encore. Elle secoue les bras pour chasser le sang qui coule vers ses mains. Elle attaque au ventre, il recule d’un puissant saut mais pas assez car le bras s’allonge et la dague vient perforer la plaque du ventre et  déchirer les trois épaisseurs de mailles rivetées.

En blessant ses entrailles, elle hume le parfum de la peur de son adversaire dans son sang et exhalant de sa peau remplaçant sa suffisance.

Tenaillé par la douleur, animé par l’énergie du désespoir, il frappe plus fort, les parades tiennent mais les dagues pleurent des étincelles. Il feinte, elle pivote et pare une attaque factice, offre son dos. Il fait un pas de coté, frappe d’estoc au cou, elle esquive des jambes.

Il rajuste son coup terrible, transperce l’omoplate droite, pour ressortir de trois pieds  sous la jolie clavicule à la naissance du sein.

Le sang lui gicle au visage, malgré son casque et sa visière, manquant de peu ses yeux, brûlant sa peau, ses cils, ses sourcils et sa barbe. La surprise lui fait lâcher son épée.

Soupesant la difficulté et l’avantage, elle bondit et amerrit quinze pas plus loin à l’abri du quai.

Son casque fume de l’intérieur comme de l’extérieur, il l’ouvre puis l’ôte et le jette. Il cherche sa vile proie et sa précieuse épée sainte. Il s’essuie rapidement le visage et le cou sur un chiffon sale et puant pris à la ceinture du marchand, sa face est à vif et ses poils se dissolvent.

Son casque ouvragé, gravé du symbole de sa foi n’est plus qu’un petit tas de rouille grésillant. il a fait son office mais sa messe est dite.

L’épée consacrée subit les outrages d’une corrosion venue d’ailleurs, perd sa substance dans sa partie incarnée, devient un barreau rouillé. Nager est difficile avec la blessure et les lourds appendices récents qui ne sont pas des nageoires. Elle coule lestée de plus de vingt livres d’acier qui la brûle, visiblement conçue contre sa nature.

Le marchand devine que d’autres ont des problèmes plus graves, rebrousse chemin, jette son chiffon à moitié dissout et rince sa main dans un tonneau de pluie.

Les miliciens de nuit, fatigués, ont peur, du paladin et de sa puissante cible, mais ne veulent pas s’enfuir car cela causerait leur perte. Les marins du bâtiment de guerre, suivent les ordres du paladin, scrutent l’eau, s’aidant du fanal du bord pour chasser l’ombre de la ville.

Au fond de l’eau, elle marche sur le sable entre les algues et s’oriente vers l’ouverture de la crique qui protège le port. Elle retient son souffle.

Le paladin reçoit les soins du chirurgien de bord qui le tartine le visage et le cou d’onguent apaisant et cicatrisant et lui verse du vin très chaud dans le ventre. Les miliciens apeurés, suivent les ordres, se répartissent sur le bord du quai, l’épieu vers l’eau, prêt à frapper tout ce qui en sortirait.

En pleine mer, elle allonge les jambes pour avoir le nez à l’air entre deux vagues. L’épée finit par se rompre . La blessure ne saigne plus. Elle dégage les morceaux de sa main valide, les laisse couler sans égard pour les pierreries de la poignée avant de la ramasser sur le fond.

Chapitrage

page suivante