Journal de Bertrand, sur la brèche

   Cela fait des années que je me questionne sur l'intensité de ma foi, voire sur son existence. La condition de membre du clergé ne laisse pas d'échappatoire à au moins une foi de façade. Et puis pour une majorité, il y a principalement une foi dans les pouvoirs de l'Eglise, y compris ceux que nous devons craindre plutôt qu'une foi en Dieu, en ses pouvoirs. La foi soulève des montagnes quand elle nous permet de croire en nous, en notre énergie, mais elle paralyse quand il s'agit de craindre l'institution.
   J'ai vu tant d'hommes utiliser le prétexte de la foi pour dire tout et son contraire, pour servir leurs intérêts, de vils appétits, ou tout simplement faire le mal pour le simple bénéficie de le faire et d'y prendre plaisir.
   J'avais perdu le chemin vers la mienne, je m'étais égaré. Ceux qui font le bien, sont une minorité, quand ils le font sans contre partie, sont plus rares encore. Ceux qui le font au nom de leur foi sont si exceptionnels que l’Église en fait des saints.
   Le fait d'avoir été défroqué en voulant m'opposer à de mauvais hommes d'église m'avait presque laissé indifférent. Mais pas les menaces d’être jugé par l'Inquisition et par précaution j'ai quitté le royaume d'Espagne pour celui-ci de Bretagne il y a plus de dix ans grâce à ma bien aimée Jeanne.
   Avec le sel béni par le neveu de mon ami Étienne, Lancelot de Navarre, jeune homme promis à un brillant avenir et évêque de Pampelune dès l’âge de vingt deux ans, j'ai réussi à bénir une rivière, à en faire une arme contre le Mal sous la forme d'hommes mauvais réduits depuis six cents ans à errer morts dans ces tunnels et à dévorer des patres et des pèlerins.
   Je me sens transformé par cette aventure, avec mes jeunes protégés, et ma pupille qui nous accompagne depuis presque trois mois, j'ai retrouvé la foi, la foi en Dieu mais surtout en l'humanité. L'ancien propriétaire de cette épée fabuleuse, était plus tortionnaire que paladin. Je doute qu'il pouvait tirer partie des pouvoirs des reliques dans l'état moral dans lequel nous l'avons trouvé. Le destin nous a confié cette épée, elle a servi abîmée contre des ombres. Le sbire d'un mauvais homme nous l'a réparée, magnifiée.Elle a servi à son insu pour anéantir son maître. Elle servira notre cause, mais il va falloir nous protéger des convoitises. Elle ne doit être montrée et servir que quand son pouvoir ou sa qualité est nécessaire. Elle est puissante dans la main d'Arthur. Je lui souhaite de la garder longtemps.

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